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— Attends, dit Louise, allant écouter à la porte de madame Danglars.

— Que crains-tu ?

— Qu’on ne nous surprenne.

— La porte est fermée.

— Qu’on ne nous dise d’ouvrir.

— Qu’on le dise si l’on veut, nous n’ouvrirons pas.

— Tu es une véritable amazone, Eugénie !

Et les deux jeunes filles se mirent, avec une prodigieuse activité, à entasser dans une malle tous les objets de voyage dont elles croyaient avoir besoin.

— Là, maintenant, dit Eugénie, tandis que je vais changer de costume, ferme la valise, toi.

Louise appuya de toute la force de ses petites mains blanches sur le couvercle de la malle.

— Mais je ne puis pas, dit-elle, je ne suis pas assez forte ; ferme-la, toi.

— Ah ! c’est juste, dit en riant Eugénie, j’oubliais que je suis Hercule, moi, et que tu n’es, toi, que la pâle Omphale.

Et la jeune fille, appuyant le genou sur la malle, roidit ses bras blancs et musculeux jusqu’à ce que les deux compartiments de la valise fussent joints, et que mademoiselle d’Armilly eût passé le crochet du cadenas entre les deux pitons.

Cette opération terminée, Eugénie ouvrait une commode dont elle avait la clef sur elle, et en tira une mante de voyage en soie violette ouatée.

— Tiens, dit-elle, tu vois que j’ai pensé à tout ; avec cette mante tu n’auras point froid.

— Mais toi ?

— Oh ! moi, je n’ai jamais froid tu le sais bien, d’ailleurs avec ces habits d’homme…