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on rencontre d’occasions de souffrir de sa misère : tantôt c’est un plaisir que vous ne sauriez faire à votre ami ; tantôt c’est une occasion de lui être utile, dont vous ne sauriez profiter. Vous vous rendez justice au fond de votre cœur, mais personne n’y pénètre ; et quand on connoîtroit votre bonne disposition, n’est-ce point un mal de ne pouvoir la mettre au jour ?

A la vérité, nous n’estimons pas moins un philosophe pour être pauvre ; mais nous le bannissons de notre société, s’il ne travaille à se délivrer de sa misère. Ce n’est pas que nous craignions qu’il nous soit à charge : nous l’aiderons dans ses besoins ; mais nous ne croyons pas que l’indolence soit une vertu.

La plupart des hommes qui se font une fausse idée du philosophe, s’imaginent que le plus exact nécessaire lui suffit : ce sont les faux philosophes qui ont fait naître ce préjugé par leur indolence, et par des maximes éblouissantes. C’est toujours le merveilleux qui corrompt le raisonnable : il y a des sentimens bas qui ravalent l’homme au-dessous même de la pure animalité ; il y en a d’autres qui semblent l’élever au-dessus de lui-même. Nous condamnons également les uns et les autres, parce qu’ils ne conviennent point à l’homme. C’est corrompre la perfection d’un être, que de le tirer hors de ce qu’il est, sous prétexte même de l’élever.

J’aurois envie de finir par quelques autres préjugés ordinaires au peuple philosophe, mais je ne veux point faire un livre. Qu’ils se détrompent. Ils en ont comme le reste des hommes, et sur-tout en ce qui concerne la vie