Page:Duliani - La ville sans femmes, 1945.djvu/44

Cette page a été validée par deux contributeurs.
42
LA VILLE SANS FEMMES

laquelle j’enlevais les tisons encore brûlants des hautes branches des arbres abattus, lorsque le caporal qui commandait l’escorte cria à haute voix :

— Tous ceux qui ont une pelle, par ici !

Mû par la curiosité, je répondis avec empressement à l’appel. Mais je fus mal récompensé. Un énorme camion rempli de charbon venait d’arriver.

— Montez là-dessus, dit le caporal, vous et vos trois camarades qui avez une pelle. Déchargez le charbon.

Au premier abord, je crus que la besogne serait facile. Mais après dix minutes de travail, je commençai à déchanter. C’était vraiment dur. Mes mains se crispaient au manche de la pelle, dont la pale refusait de s’enfoncer dans le tas de minerai qui semblait fait non pas de morceaux détachés mais d’une sorte de matière compacte et d’une résistance à toute épreuve. Je m’entêtai, voulant absolument vaincre la difficulté, puisque c’était encore là la meilleure manière que nous avions d’exercer notre volonté.

À midi, lorsque je rentrai au village pour déjeuner, je crois que je dévorai tout ce que je trouvai devant moi. Après le repas, je filai jusqu’à mon lit où je ne fus pas plutôt allongé que j’étais déjà endormi. Hélas ! à une heure, la sonnerie d’une trompette vint m’avertir que l’heure du départ pour le bois était arrivée. Nous déchargeâmes ainsi plus de vingt camions de charbon.

À la fin du quatrième jour, je déclarai forfait… et j’abandonnai l’épreuve, heureux malgré tout de ce que j’avais fait.