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LA LEGENDE D’ANTONIA

L’unique, l’absolument, la toute aimée,
Sache, et sois guéri, bien-aimé !

… Ah ! supplice qui me dévore !
Châtiment pire cent fois que la mort !

Expiation effroyable !
Torture imprévoyable !

Il entend et ne sait pas,
Il voit et ne reconnaît pas,
Et je suis là, présente, ainsi que si je n’étais pas.
 
… Ô tristes yeux, ô sombres yeux fermés,
Oui ne voient plus celle que tant ils ont aimée !

Pâle front que hante le mensonge,
Front où la brume indéfiniment se prolonge !

Ô pauvre corps débile,
Pauvre cœur en plaies si fertile,
Pauvre âme si fragile !

Chair pitoyable.
Souffle autrefois si valeureux et maintenant si lamentable !

Ô toi, qu’en tes blessures et tes douleurs et tes blasphèmes
Suprêmement — je le dis au ciel — j’aime !

Le baiser que tu me donnas,
Le baiser que je reçus — combien divin — de toi là-bas,