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L’UNIVERSITÉ DE PARIS AU XVe SIÈCLE

Parmi les victimes ne se trouvaient pas seulement deux évêques, comme le dit Maître Johannes Johannis, mais quatre[1], dont trois avaient appartenu à l’Université ; ces évêques étaient : Jean d’Achery, de Laon, maître en Théologie, député de l’Université au Concile de Constance et évêque de Senlis ; Guillaume de Gantier, ancien membre de l’Université, docteur en droit et évêque d’Évreux ; Pierre Fresnel, licenciatus utriusque juris, ancien élève de l’Université, évêque de Lisieux ; enfin le fils du chancelier de France, Jean de Marie, évêque de Constance.

D’autres membres ou anciens membres de l’Université furent également mis à mort ; tels Maître Benoît Gentiani, de Paris, docteur en Théologie et religieux de Saint-Denis ; un autre docteur en Théologie, de Reims, Carmélite ; un docteur en droit, Maître Werner Berrey, alors conservateur des privilèges de l’Université ; un docteur en médecine, Jean Carson ou Casson ; Maître Jean de Londa, de la Nation Picarde ; Maître Jean de Montreuil et plusieurs autres.

Plusieurs de ceux-ci avaient été emprisonnés au Petit Châtelet ; les égorgeurs se postèrent à l’entrée d’une poterne et firent l’appel des détenus ; au fur et à mesure qu’il s’en présentait un, il avait la tête tranchée, puis son corps, lardé de coups, était jeté dans un cloaque voisin.

Dans le massacre périrent deux ou trois membres du Collège de Navarre, entre autres un ancien recteur de l’Université. Ce collège fut particulièrement en butte à la fureur des insurgés ; ils l’envahirent, pénétrèrent de vive force dans les chambres des élèves, les saccagèrent, mirent la bibliothèque au pillage et accablèrent d’injures les étudiants. « À ce moment, dit Launoy, c’était crime capital que d’appartenir au Collège de Navarre. »

Le 14 Juillet, Jean sans Peur avait fait dans Paris, avec Isabeau de Bavière, son entrée solennelle ; ses partisans, tels Pierre Cauchon, revinrent de toutes parts ; ils les combla d’honneurs, leur donnant les charges des victimes du 12 Juin ; l’audacieuse cruauté des Cabochiens en fut accrue.

À peine apaisée, l’émeute gronda de nouveau. « Le 20 Août 1418, écrit Johannes Johannis[2], pendant la nuit, vers dix heures, commença un violent soulèvement populaire de la ville de Paris ; il dura toute la nuit et toute la journée du lendemain ;

  1. Liber procuratorum…, t. II, col. 246 et notes au bas des col. 245-247.
  2. Liber procuratorum…, t. II, col. 252.