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LE VIDE ET LE MOUVEMENT DANS LE VIDE

rien, il en peut créer une infinité ; je dis une infinité en puissance, c’est-à-dire qu’il n’en aura jamais tant créé qu’il n’en puisse créer davantage. »


F. Jean de Duns Scot


La doctrine que Duns Scot professe, au sujet du vide, c’est, très nettement, la doctrine d’Henri de Gand. En dépit des objections d’Aristote, il admet que Dieu peut produire un espace vide[1].

« On ne voit pas, dit-il, qu’il soit contradictoire d’admettre une surface concave sans admettre aucun rapport de cette surface à un corps qui y serait contenu, pourvu, toutefois, qu’il existât un corps naturellement apte à être contenu par cette surface. » Le Docteur subtil qui vient de déclarer possible l’existence d’un corps que rien ne contient — telle la dernière sphère céleste — remarque fort justement que cette possibilité se doit étendre au corps qui ne contient rien.

Une telle surface concave qui ne contient rien, Dieu pourrait fort bien la réaliser. « D’une manière absolue, Dieu pourrait anéantir les éléments sans rien changer à l’existence du ciel ; cela posé, les parois du ciel ne viendraient pas instantanément se réunir, car la nature ne peut, en un instant, accomplir un tel changement ; la surface concave du ciel subsisterait donc et cependant, cette surface ne contiendrait plus aucun corps. »

Quelle est donc la portée de la démonstration dressée par Aristote contre la possibilité du vide ? « Cette démonstration ne tient que si l’on regarde le vide comme un espace privé de qualités naturelles, mais pourvu de dimensions d’une manière actuelle (spatium actu dîmensionaium^ licet non habeat qualitaies naturales)…

» Mais ce vide que nous déclarons possible à l’égard de Dieu n’est pas un certain espace qui possède des dimensions positives ; là, il y a seulement possibilité de recevoir des dimensions positives de telle grandeur et, en même temps, absence de toute dimension en acte (possibilitas ad tantas dimensiones positivas, cum carentia cujuscunque dimensionis in actu)

» Par intervalle (medium) on peut entendre soit un intervalle

1. Joannis Duns Scoti Quodlibeta, quæst. XI : Utrum Deus possit facere quod manente corpore et loco, corpus non habeat ubi, sive esse in loco. De secundo.

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