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LA COSMOLOGIE HELLÉNIQUE

Le texte du commentaire au Timée, auquel se réfère M. C. Manitius, nous paraît avoir un sens contraire à celui que lui prête cet auteur. Voici, en effet, ce que nous y lisons[1] :

« C’est, dit Ptolémée dans sa Syntaxe, en se laissant guider par la convenance et la probabilité, qu’il a admis que le rang du milieu parmi les sept astres errants appartenait au Soleil… Mais, dans les Hypothèses, il ne s’est guère étendu sur les distances, en sorte qu’il ne raisonne pas non plus, dans cet ouvrage, sur ces distances (Ἐν δὲ ταῖς Ὑποθέσεσιν ἐϰ τῶν ἀποστημάτων οὐ πάνυ διατεινόμενος[2] οὐδὲ ἐν ταύταις συλλογίζεται περὶ αὐτῶν). »

Proclus expose alors, au sujet des distances de Mercure et de Vénus, un calcul tout semblable à celui qu’il a développé dans l’Hypotypose. Ce calcul, il le fait suivre de ces paroles :

« Il ne faut pas, en effet, qu’il y ait aucun vide. Ptolémée conclut donc en de semblables termes que le Soleil est l’astre du milieu parmi les astres errants — (Δεῖ δὲ οὐδὲν εἶναι ϰενόν. Ὁ μὲν οὖν Πτολεμαῖος ἐν τοιούτοις λόγοις συνάμει μέσον· εἶναι τὸν ἥλιον τῶν ἑπτὰ πλανήτων). Mais ne discourons pas longuement au sujet des mathématiciens qui raisonnent selon les apparences. »

Nous trouvons ici l’affirmation formelle qu’aux Hypothèses, Ptolémée ne raisonnait aucunement sur les distances des astres. Or cette affirmation est parfaitement conforme à ce que va nous apprendre la lecture de cet ouvrage.

Le texte grec du second livre des Hypothèses des planètes est perdu, mais on en possède une traduction arabe, assez médiocre d’ailleurs. De cette traduction arabe, une version allemande, commencée par L. Nix, et achevée, après la mort de celui-ci, par MM. F. Buhl et P. Heegard, a été récemment publiée. Or nous y trouvons le passage suivant[3] :

« Les mêmes principes nous ont fait voir que Mercure et Vénus ne se trouvaient pas au-dessus du Soleil, mais bien entre le Soleil et la Lune ; cela est nécessaire pour que cet espace intermédiaire, que la simple apparence et la détermination précise des distances s’accordent à montrer si grand, ne demeure pas vide, comme si la Nature l’avait oublié et délaissé au point qu’il ne lui fût d’aucun usage ; il faut, au contraire, prendre les distances de ces deux

  1. Procli Diadochi In Platonis Timœam commentaria. Edidit Ernestus Diehl, Lipsiæ ; MCMVI, t. III, pp. 62-63.
  2. Avant οὐδὲ ἐν ταύταις, le texte porte les mots : οὐδὲ ἐν τούτοις que certains éditeurs suppriment, semble-t-il, avec raison. À quoi se rapporteraient-ils ?
  3. Claudii Ptolemaei Opera quœ exstant omnia. Vol. II. Opera astronomica minora. Edidit J.-L, Heiberg. Lipsiæ, MDCCCCVII. Ὑποθέσεων τῶν πλανωμένων Β′. Ex Arabico interpretatus est Ludovicus Nix ; p. 118.