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LA COSMOLOGIE DES PÈRES DE L’ÉGLISE

les marées épousent le mouvement lunaire ; ce dernier effet, si manifeste, empêche les plus sceptiques de douter des autres.

Saint Basile, qui se rit des tireurs d’horoscopes et de leurs dupes, se garde bien de contester cette efficace de la Lune, il admet[1] que certaines parties des êtres vivants augmentent ou diminuent selon que la Lune croît ou décroît ; « tel le cerveau des animaux, les plus riches en humeur des animaux marins et la moëlle « les végétaux ».

Aux changements de la lunaison, Saint Basile attribue les perturbations de l’atmosphère[2]. « De même en est-il des courants alternatifs des détroits ; de même, de la marée de l’Océan, car les riverains de cette mer ont reconnu que la marée suivait régulièrement les périodes de la Lune »,

Des phénomènes présentés par les détroits, notre auteur donne une description confuse et inexacte ; il croit que la nouvelle-lune y produit une agitation tumultueuse des flots, et que cette agitation se calme à la pleine-lune.

Plus exacte est sa connaissance du flux et du reflux de l’Océan. « La mer occidentale, dit-il, est sujette aux marées ; tantôt elle déborde et tantôt elle rentre dans son lit ; comme si la Lune, par ses aspirations, la soulevait et la tirait à sa suite, puis, en émettant des expirations, la refoulait dans les bornes qui lui sont propres — Ὥσπερ ἀναπνοαῖς τῆς σελήνης ὑφελϰομένη πρὸς τὸ ὀπίσω, ϰαὶ πάλιν ταῖς ἀπ’ αὐτῆς ἐϰπνοίαις, εἰς τὸ οἰϰεῖον μέτρον προωθουμένη ».

Cette allusion courte, mais précise, faite par Saint Basile à la théorie des marées attira vivement l’attention de la Science naissante des Chrétiens.

Saint Ambroise paraphrase[3] ce que Saint Basile a dit de l’influence de la Lune sur le cerveau des animaux, sur les coquillages, sur les parties molles des végétaux, sur les perturbations atmosphériques ; il reproduit, en les altérant quelque peu, les troubles indications données par son prédécesseur au sujet des courants de marée dans les détroits ; enfin, par une traduction textuelle, il écrit : « Ut mare ipsum occidentale, in quo spectatur ampotis, solito amplius accedat ac recedat, et majore æstu feratur, tamquam Lunæ quibusdam aspirationibus retrorsum trahatur, et iisdem impulsum ac retractum in mensuram propriam refundatur ».

  1. S. Basilii Homilia VI in Hexaemeron, cap. X [S. Basilii Opera, accurante J. P. Migne, t. I (Patrologiœ grœcœ t. XXIX) coll. 143-144].
  2. S. Basilii Homilia VI in Hexaemeron, cap. XI ; éd. cit., t. cit., coll. 143-144.
  3. S. Ambrosii Hexaemeron lib. IV, cap. VII, 29 et 30 [S. Ambrosii Opera, accurante J. P. Migne, t. I, pars I (Patrologiœ latinœ t. XIV), coll. 202-203].