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LA COSMOLOGIE HELLÉNIQUE

valle, les philosophes croient devoir examiner les rapports des distances apogées et périgées de Mercure et de Vénus et rechercher s’ils peuvent satisfaire à ces nombres. Or ils trouvent que l’intervalle entre l’apogée de l’épicycle [de Mercure] et le centre du Zodiaque est à la distance entre le périgée de l’épicycle et le même centre comme 91° 30′ à 33° 4′[1]. Ils disent alors : Comme 33° 4′ est à 91° 30′ ainsi 64,10, qui est la plus grande distance de la Lune, est à un quatrième terme, qu’ils trouvent égal à 177,33 à peu près. C’est la plus grande distance de Mercure.

» Or comme l’écart entre 177,33 et 1160, périgée du Soleil, est considérable, ils veulent, pour qu’il n’y ait pas de vide, y insérer une autre sphère, et que ce soit celle de Vénus ; car on a observé que Vénus est inférieure à Mars, comme Mercure circule sous l’orbite de Vénus. Ils prennent donc le rapport entre la distance du périgée de Vénus au centre du Zodiaque et la distance de l’apogée au même centre, rapport qui est celui de 15° 35′ à 104° 25′ ; ce rapport est égal au rapport entre 177,33, distance apogée de Mercure, et un quatrième terme ; pour valeur de ce quatrième terme, ils trouvent 1150, ce qui est presque la distance périgée de 1160 du Soleil. C’est ainsi qu’on démontrera les distances périgées et apogées des divers astres, en reliant les termes extrêmes par des termes moyens. »

Proclus le Diadoque paraît avoir surtout vu, dans ce calcul[2], une preuve en faveur de l’ordre suivant lequel Ptolémée avait rangé Mercure, Vénus et le Soleil. La vogue dont bénéficia bientôt, cette méthode propre à déterminer les dimensions du système du Monde contribua grandement, ce n’est pas douteux, à rallier les suffrages aux positions des divers astres assignées par la Syntaxe.

Simplicius[3] attribue à cette méthode une portée toute semblable à celle que Proclus lui accordait. Il énumère les arguments par lesquels on prouve que Vénus et Mercure sont situés au-dessous du Soleil, et termine son exposition par ces paroles : « Cela se démontre encore par les rapports entre les distances de leurs apogées et de leurs périgées ; on démontre, en effet, que la plus

  1. Ptolémée et ses successeurs usent toujours de la division en signes (30°), degrés (60′), minutes (60″) et secondes pour évaluer les dimensions des excentriques et épicycles. L’unité de longueur est divisée en 12 signes ou 360°.
  2. M. C. Manitius (Procli Diadochi Hypotyposis, éd. Manitius, pp. 307-308) a, dans ce calcul, relevé diverses inexactitudes.
  3. Simplicii In Aristotelis de Cœlo commentaria. Edidit Karsten, Trajecti ad Rhenum 1865, p. 213., col. b ; edidit J. L. Heiberg, Berolini, 1894, p. 474.