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LA PRÉCESSION DES ÉQUINOXES

nombre d’astronomes à étudier cette doctrine. Said ben al-Hhasan al Andalousi, juge de Tolède [mort en 1070] fait cette déclaration : Lorsque j’eus achevé la lecture de ce livre, il m’apparut, au sujet de ce mouvement, des vérités qui n’ont, je pense, apparu jusqu’ici à personne ; en cet écrit, j’ai découvert les principes que j’ai exposés dans un livre intitulé : Correction des mouvements des étoiles ».

Or, ce livre as-Sindhind, dont Ibn al Adami s’était inspiré, à l’imitation d’Habasch et de bon nombre d’auteurs arabes, n’était autre que le traité indien Sourya-Siddhânta ; et ce traité adoptait[1] une théorie de l’accès et du recès analogue à celle qu’avaient exposée les « anciens astrologues » mentionnés par Théon d’Alexandrie ; seulement, l’amplitude de l’oscillation était portée de à 54°, et la vitesse qui lui était attribuée atteignait à peu près en 67 ans. C’est donc ce système, présenté par un contemporain de Thâbit ben Kourrah, qui était loué par ses successeurs comme la théorie la plus parfaite du mouvement de trépidation qu’on eût encore donnée ; éloge bien singulier de la part de ces astronomes, s’ils eussent connu le Liber de motu octavæ sphæræ !

Les renseignements concordants que nous fournissent Ibn Iounis, Albyrouny, Ibn al Kifti, nous permettent donc d’affirmer que Thâbit ben Kourrah et ses successeurs immédiats avaient admis l’hypothèse de l’accès et du recès et en avaient tiré des conséquences relatives à la durée de l’année ; mais ils ne nous autorisent nullement à affirmer que le système de trépidation adopté par ces astronomes fût celui qui est exposé au Liber de motu octavæ sphæræ.

Nous allons entendre bientôt divers auteurs musulmans ou juifs nous affirmer, de la manière la plus catégorique, que ce dernier système a été imaginé par Al Zarkali.

Ibrahim ben Iahia al Nakkach abou Ishac, surnommé Ibn al Zarkali al Andalousi, est désigné, dans les écrits astronomiques du Moyen Âge, par les noms d’Azarchele, Arzachele, al Zarcala, etc.[2]. Le titre al Andalousi, que lui donnent certains manu-

  1. Th. H. Martin, Mémoire sur cette question : La précession des équinoxes a-t-elle été connue… avant Hipparque ? Ch. VI, § 5.
  2. Sur Al Zarkali, voir : Vite di matematici arabi tratti da un’opera inedita di Bernardino Baldi, con note di M. Steinschneider, art XI : Arzahele (Bulletino di Bibliografia e di Storia delle Scienze matematiche e fisiche, pubblicato da B. Boncompagni, t. V, 1872, pp. 508-524) — M. Steinschneider, Études sur Zarkali, astronome arabe du XIe siècle, et ses ouvrages (Bulletino… pubblicato da B. Boncompagni, t. XIV. 1881, pp. 171-182 — t. XVI, 1883, pp. 493-527 — t. XVII, 1884, pp. 765-794 — t. XVIII, 1885. pp. 343-360 — t. XX, 1887, pp. 1-36 et pp. 575-604).