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LA PRÉCESSION DES ÉQUINOXES

renouvelleraient lorqu’il se renouvelle ; elles ont donc leur cause en l’orbe des étoiles fixes. »

Plus loin, Al Bitrogi disait[1] : « Il est possible que de ce mouvement proviennent les grands changements qu’on observe en ce monde inférieur, et ceux qui rendent inhabitables les régions qui étaient habitables, et inversement. »

La doctrine indienne que Massoudi nous a fait connaître est donc pleinement adoptée par Al Bitrogi.

Moïse Maïmonide suit une opinion voisine de celle d’Al Bitrogi.

Après avoir, à l’imitation de Djéber ben Allah, placé Vénus et Mercure au-dessus du Soleil, il subdivise le ciel en quatre sphères principales qui sont la sphère de la Lune, la sphère du Soleil, la sphère des planètes, enfin la sphère des étoiles fixes ; puis il écrit[2] :

« Bien que de l’ensemble de ces quatre sphères figurées, il émane des forces qui se répandent dans tous les êtres qui naissent et dont elles sont les causes, chaque sphère, cependant, peut avoir sous sa dépendance l’un des quatre éléments, de manière que telle sphère soit le principe de force de tel élément en particulier, auquel, par son propre mouvement, elle donne le mouvement de la génération.

» Ainsi donc la sphère de la Lune serait ce qui meut l’eau ; la sphère du Soleil, ce qui meut le feu ; la sphère des autres astres errants, ce qui meut l’air (et leurs mouvements multiples, leurs inégalités, leurs rétrogradations, leurs marches directes et leurs stations produisent les nombreuses configurations de l’air, sa variation et sa prompte contraction ou dilatation) ; enfin la sphère des étoiles fixes ce qui meut la terre ; et c’est peut-être à cause de cela que cette dernière se meut difficilement pour recevoir l’impression et le mélange, parce que les étoiles fixes ont le mouvement lent…

» De cette manière, donc, il se peut que l’ordre soit celui-ci : Quatre sphères, quatre cléments mus par elle et quatre forces, émanées d’elles, agissant dans toute la nature. »

Les astrologues arabes avaient, semble-t-il, eux aussi, et bien avant Al Bitrogi et Maïmonide, admis que les changements lents qui se produisent à la surface du globe terrestre sont sous la dépendance du mouvement propre des étoiles fixes ; nous en trouvons le témoignage dans les écrits d’Albumasar.

  1. Alpetragii Arabi Planetarum theorica, fol. 14, vo.
  2. Moïse ben Maimoun dit Maïmonide, Le guide des égarés, trad. par S. Munk ; Deuxième partie, ch. X ; t. II, pp. 86-88.