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PHYSICIENS ET ASTRONOMES. — II. LES SÉMITES

pace), par Ibn Tofaïl (Aboubekr), par Ibn Rochd (Averroès), par Moïse ben Maimoun (Maïmonide), produire un système astronomique, le système d’Al Bitrogi (Alpetragius), qui, jusqu’au xvie siècle, tentera sans cesse de se substituer au système de Ptolémée.

Abou Bckr Mouhammed ben lahia ben Badschdscheh al Todschibi al Saracosti est souvent nommé par les Arabes Ibn al Sâig (ou Ibn al Çâyeg)[1]  ; le nom d’lbn Badschdscheh est souvent orthographié Ibn Bâdja ; ce nom, à son tour, que les traducteurs juifs ont transformé en Aben Bâdja, est devenu Avempace dans les écrits des docteurs de la Scolastique latine.

L’épithète al Saracosti nous apprend qu’Ibn Bâdja était né à Saragosse. De sa vie, nous savons seulement qu’il exerça la médecine à Séville jusqu’en 1118, qu’il se rendit alors à la cour de Fez, où il occupait le rang de vizir, et qu’en 1138, les médecins de Fez se débarrassèrent par le poison de ce concurrent envié.

Ibn Bâdja a été un des plus profonds philosophes de l’Islam ; ses doctrines ont exercé la plus grande influence sur deux des plus éminents esprits de la Scolastique, Averroès parmi les Arabes et Albert le Grand parmi les Chrétiens.

Moïse Maïmonide écrit[2] : « Abou Bekr ben al Çâyeg, dans un discours qui existe de lui sur l’Astronomie, a dit que l’existence de l’épicycle est inadmissible » ; et Maïmonide nous fait connaître les raisons par lesquelles Ibn Bâdja prétendait établir cette impossibilité.

« D’abord, établir un épicycle qui tourne sur une certaine sphère, sans tourner autour du centre de cette sphère qui le porte, comme cela a été supposé pour la Lune et pour les cinq planètes, voilà une chose dont il suivrait nécessairement qu’il y a roulement, c’est-à-dire que l’épicycle roule et change entièrement de place, chose à laquelle on a voulu échapper, à savoir qu’il y ait dans le Ciel quoi que ce soit qui change de place ».

En second lieu, « il y aurait une révolution autour d’un centre qui ne serait pas celui du Monde ; et cependant c’est un principe fondamental de tout cet Univers que les mouvements sont au nombre de trois : un mouvement partant du centre, un autre se dirigeant vers le centre, et un autre autour du centre. Mais s’il y avait un épicycle, son mouvement ne serait ni centrifuge ni centripète ni autour du centre ».

  1. Sur ce personnage, voir : Ferdinand Wüstenfeld, Geschichte der Arabischen Aertze und Naturforscher, Göttingen, 1840, no 163, pp. 93-94.
  2. Moïse Maimonide, Le guide des égarés, trad. Munk, deuxième partie, ch. XXIX ; tome II, pp. 185-186.