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mais il est devenu la richesse même, et, considéré à ce point de vue, il n’est plus le mutuum dont parle St-Luc, c’est-à-dire le moyen de venir au secours du voisin qui en a un besoin momentané ; il est un moyen, entre les mains de celui qui le prête, de vivre sur le travail de celui qui l’emprunte. C’est donc le changement de destination de la richesse mobilière, et surtout son extrême développement entre les mains de quelques-uns qui a modifié complètement le monde économique. C’est surtout dans les grandes entreprises industrielles, dans les grands emprunts nationaux, que l’on peut constater les effets prodigieux des prêts à intérêt ; des classes sociales considérables, même des nations entières en éprouvent les funestes effets, quelquefois pendant des siècles, jusqu’à l’époque où quelque grande commotion, comme nous l’avons vu dans notre histoire, et comme on l’a vu à peu près chez tous les peuples, vient rétablir l’équilibre en détruisant et abolissant en un seul jour les titres mêmes de créances qui paraissaient les plus sûrs.

Évidemment, ce ne sont pas quelques corrections ou amendements individuels qui peuvent modifier la situation. Nous vivons dans cette atmosphère d’usure universelle ; nous en vivons ou nous en souffrons fatalement. Une loi même viendrait tout à coup à abolir tous nos contrats d’usure, que ce serait une perturbation encore plus grande que le mal ; ce n’est point par une sorte de coup d’État économique qu’on peut modifier le malaise signalé par tous les écrivains attentifs. Je vois, dans une répartition plus juste de l’impôt, sinon le remède, au moins une amélioration de l’état fâcheux du pays. Du reste, les dis-