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grand nombre : mais rien n’est plus misérable, ni plus malpropre, si vous en exceptez les grandes routes, où vous en trouvez qui sont fort vastes et fort belles ; mais il faut toujours porter son lit avec soi ou bien se résoudre à coucher sur une simple natte. Il est vrai que les Chinois, surtout le petit peuple, ne se servent guère de draps, et qu’ils se contentent de s’envelopper, quelquefois même tout nus, dans une couverture, dont la doublure est de toile ; ainsi leur lit n’est pas difficile à porter.

La manière dont on est traité s’accorde parfaitement avec la manière dont on y est logé : c’est un grand bonheur quand on y trouve ou du poisson, ou quelque morceau de viande. Il y a cependant des endroits où les faisans sont à meilleur marché que la volaille : on en a quelquefois quatre pour dix sols.

Quelques-unes de ces hôtelleries paraissent mieux accommodées que les autres, mais elles ne laissent pas d’être très pauvres : ce sont pour la plupart quatre murailles de terre battue, et sans enduit, qui portent un toit dont on compte les chevrons, encore est-on heureux quand on ne voit pas le jour à travers ; souvent les salles ne sont point pavées, et sont remplies de trous.

Il y a des provinces, où ces sortes d’auberges ne sont bâties que de terre et de roseaux. Dans les villes, les hôtelleries sont de briques, et assez raisonnables. Dans les provinces du nord on y trouve ce qu’ils appellent des can : c’est une grande estrade de briques, qui occupe la largeur de la salle, et sous laquelle il y a un fourneau : on étend dessus une natte de roseaux, et rien plus. Si vous avez un lit, vous l’étendez sur la natte.


Itinéraire public.

On a soin d’imprimer un itinéraire public, qui contient tous les chemins, et la route qu’on doit tenir, soit par terre, ou par eau, depuis Peking, jusqu’aux extrémités de l’empire. Les mandarins qui partent de la cour, pour aller remplir quelques charges dans les provinces, se servent de ce livre, qui leur marque leur route, et la distance d’un lieu à un autre. A la fin de chaque journée se trouve une maison destinée à recevoir les mandarins, et tous ceux qui voyagent par l’ordre de l’empereur, où ils sont logés et défrayés aux dépens de Sa Majesté. Ces sortes de maisons se nomment cong quan.

Un jour avant que le mandarin se mette en route, on fait partir un courrier, qui porte une tablette, où l’on écrit le nom et la charge de cet officier. On prépare aussitôt le logis où il doit passer la nuit. Les préparatifs sont proportionnés à sa dignité : on lui fournit tout ce qui lui est nécessaire comme les viandes, les portefaix, les chevaux, les chaises, ou les barques, s’il fait le voyage par eau. Les courriers qui annoncent l’arrivée du mandarin, trouvent toujours des chevaux prêts, et afin qu’on n’y manque pas, un ou deux lys[1], avant que d’arriver, il frappe fortement et à diverses reprises sur un bassin, afin d’avertir qu’on selle promptement le cheval, s’il ne l’était pas encore.

Ces maisons destinées à loger les mandarins, ne sont pas aussi belles que leur destination pourrait le faire imaginer : c’est pourquoi, lorsqu’on lit

  1. Dix lys font une lieue commune de France.