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pieusement recueillis par M. Rathelot, chef de bureau de l’état civil au tribunal de première instance. Or entre les mains d’un homme perspicace et dévoué les épaves de l’incendie ont été un véritable trésor ; il s’est dit que, puisque l’on restituait les palimpsestes d’Herculanum, il serait peut-être possible de restituer aussi les actes dont toute trace n’avait pas été détruite.

Une difficulté se présentait : les registres, quoique ayant conservé la forme primitive, avaient si longtemps séjourné au milieu du brasier, que chacun d’eux faisait un tout homogène et que, dès que l’on essayait de détacher une feuille, celle-ci tombait en poussière. Des savants vinrent voir ces débris noircis qui contenaient tant de secrets ; ils les regardèrent longtemps et promirent de chercher un moyen de les utiliser. Ce moyen, qu’ils cherchent encore, M. Rathelot le trouva par inspiration : il enleva d’un coup de tranchet le dos du registre de façon à n’avoir plus qu’un amas de feuilles isolées que l’incendie avait rendues adhérentes l’une à l’autre ; il fit tremper dans l’eau ce paquet, qu’on eût volontiers pris pour une planche en charbon, puis il l’exposa tout humide à la bouche d’un calorifère ; l’eau, en se vaporisant à la chaleur, souleva une à une toutes les feuilles, qu’on put alors séparer, à la condition de les manier avec des précautions extraordinaires. On déchiffra les actes qu’elle contenait, on les transcrivit, et le greffier en certifia l’expédition conforme en y ajoutant la mention : « Copie faite et collationnée sur une minute carbonisée. »

Quoi ! lire sur une feuille de papier brûlé une écriture que le feu a dû effacer à jamais ! Certes ! et chacun peut en faire l’expérience. Le feuillet si habilement sauvé ressemble à un lambeau d’une étoffe que les femmes connaissent bien et qui fut fort à la mode au temps de nos grand-mères ; je parle du droguet, qui a