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cédé pour reconnaître, avec certitude, les diverses sophistications dont il est l’objet. La science s’est mise à l’œuvre et a répondu rapidement à l’appel qui lui était adressé ; M. Henri de Parville terminait ainsi, le 30 avril 1875, un des remarquables articles scientifiques qu’il publie dans le Journal des Débats :

Maintenant on dénature surtout l’alcool vinique par l’addition d’un neuvième environ d’esprit de bois du commerce. M. Peligot a trouvé cette proportion dans un alcool destiné à une pharmacie. L’esprit de bois qui sert à falsifier l’alcool vinique se fabrique en grand dans l’industrie à un prix peu élevé pour la fabrication des couleurs d’aniline. Il est connu sous le nom de méthylène et marque 98° à l’alcoomètre. Son odeur et son goût sont assez faibles pour qu’on ne puisse s’apercevoir de sa présence quand il entre pour une faible proportion dans une liqueur alcoolisée. MM. Riche et Bardy, chimistes bien connus, attachés au ministère du commerce, viennent d’indiquer un moyen assez simple de reconnaître et de doser l’alcool méthylique dans l’alcool ordinaire. On prépare avec l’alcool suspect de l’éthylaniline. Si l’alcool est pur, l’éthylaniline obtenue est elle-même pure. Si l’alcool renferme de l’esprit de bois, on obtient en même temps de la méthylaniline. Or, en oxydant l’éthylaniline par les réactifs connus, on produit une matière colorante qui teint mal un tissu de laine, en lui communiquant une couleur bois. La méthylaniline, au contraire, oxydée dans les mêmes conditions, donne une couleur violette très-riche. Donc coloration brune, alcool pur ; coloration violette, alcool frelaté. La comparaison des teintes obtenues permet de reconnaître très-exactement la proportion dans laquelle le mélange a été effectué. L’erreur possible ne dépasse pas 1 %. La méthode est donc précise ; il est bon de l’indiquer aux chimistes, et il n’est pas superflu de prévenir les falsificateurs que l’administration possède maintenant un moyen sûr de déceler la fraude, et de reconnaitre l’esprit de bois dans l’alcool alors même qu’il s’y trouverait en quantité extrêmement petite. »