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lité des conditions est une loi sociale et une loi naturelle. Si tout le monde était également riche, tout le monde serait également pauvre ; nul ne produirait plus, nul ne travaillerait plus, et la nation qui réaliserait cette absurde utopie ne tarderait pas à mourir de misère.

Que ce soit là l’idéal secret qui a essayé de se formuler à Paris pendant la Commune, on n’en doit pas douter ; un procès récent ne laisse subsister aucune obscurité à cet égard ; rien n’est plus clair qu’un document où l’on peut lire : « Les massacres doivent être la seule préoccupation du travailleur, dont l’intérêt est de se débarrasser complètement de ceux qui vivent de l’exploitation de l’homme par l’homme… guerre à Dieu ! guerre à la propriété ! l’assassinat est un instrument indispensable par lequel il faut commencer… n’épargnons personne… morte la bête, mort le venin[1] ! » Diderot, dans le Neveu de Rameau, a écrit ce mot profond : « Dans la nature, toutes les espèces se dévorent ; toutes les conditions se dévorent dans la société. » L’important est de ne pas se laisser dévorer et de défendre une civilisation qui, comme toute chose humaine, est perfectible, mais qui, dans l’état actuel, est basée sur un principe d’égalité irréprochable. Il est donc utile de regarder le danger en face et de savoir aussi exactement que possible quel avenir serait réservé à Paris, à la France, si le bouillonnement des idées malsaines se précipitait par une révolution et devenait une réalité.

La classe ouvrière de Paris, celle qui, avec une humilité pleine d’orgueil, s’intitule le prolétariat, n’est point pénétrée tout entière par la haine et le besoin du bouleversement. Elle peut se diviser en trois caté-

  1. Voir la Gazette des Tribunaux du 22 avril 1874, p. 336.