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l’emplacement des Filles-Saint-Thomas on a élevé la Bourse et percé la rue de la Paix sur celui des Capucines ; l’Avé Maria a été une caserne avant d’être un marché où une tour de la vieille enceinte parisienne est consacrée à un étrange usage ; les Oratoriens du père Bérulle, les Filles de la Visitation de la mère Chantal sont des temples protestants ; les Minimes ont été, près de la place Royale, remplacés par la garde municipale ; les Célestins aussi sont une caserne ; les Jacobins du faubourg Saint-Germain avaient cédé leur cloître au Musée d’artillerie avant que celui-ci fût transporté aux Invalides ; l’Enfant-Jésus, où l’on barattait un beurre célèbre parmi les petites-maîtresses, est l’hôpital des Enfants-Malades ; les enfants trouvés vagissent dans la maison des Pères de l’Oratoire, et les filles-Saint-Sauveur doivent pleurer au ciel si elles ont appris qu’aujourd’hui leur couvent est le théâtre Déjazet. Pendant le Directoire, la plupart des couvents servaient de bals publics : « On danse aux Filles de Sainte-Marie ; on danse aux Carmes où l’on égorgeait ; on danse au Noviciat des jésuites ; on danse au couvent des carmélites du Marais ; on danse au séminaire Saint-Sulpice, » dit Mercier dans son Nouveau Paris.

Les églises, pendant la Révolution[1], servirent de dépôts, de magasins, de remises pour des entreprises de

  1. L’une d’elles, l’église Saint-Barthélémy, eut une singulière destinée. Construire au cinquième siècle, elle est agrandie par Hugues Capet qui en fait une abbaye de Saint-Benoit ; en 1138, elle devient paroisse royale à cause de sa proximité du palais. Elle est rebâtie au quatorzième siècle, restaurée au commencement du dix-septième ; en 1770, elle tombe en ruines. On entreprend de la réédifier, mais la Révolution interrompt les travaux ; elle est vendue aux enchères publiques ; on y installe le théâtre des Variétés ou de la Cité, qui jusqu’en 1799 obtient de grands succès avec une série de pièces révolutionnaires. Le théâtre est fermé par ordre en 1807 ; il est rouvert plus tard sous le nom de Théâtre des Veillées : on y trouvait un café, un bal, des concerts, des promenades champêtres ; hier encore c’était le bal du Prado, aujourd’hui c’est le Tribunal de Commerce.