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tive sans qu’il soit possible aux tribunaux de modifier la clause susdite. » Ce n’est point en effet, comme souvent on semble le croire, une continuation arbitraire du châtiment édicté par la loi ; c’est, en principe, la mesure la plus humaine qui se puisse imaginer.

À priori, l’homme qui mendie est dénué de ressources ; ce n’est point en prison, à moins de circonstances exceptionnelles, qu’il peut s’en créer ; une fois son écrou levé, il va donc se retrouver sur le pavé de Paris, sans argent, et exposé, par ce seul fait, à retomber dans le délit pour lequel il vient d’être incarcéré. La loi, dans ce cas, jetterait l’homme dans la récidive forcée et serait coupable. Au lieu de cela, elle prend ce mendiant qui est quitte avec la société, puisqu’il a purgé sa condamnation, elle le met dans une maison où il est nourri, habillé, logé, chauffé, mais où il est astreint à un travail en rapport avec ses forces, travail dont le produit, si faible qu’il soit, lui permet d’amasser une petite somme à l’aide de laquelle il pourra parer à un chômage ou subsister pendant le temps nécessaire pour trouver des moyens d’existence. Cette idée est irréprochable, et l’application en donnerait des résultats excellents, si les mendiants n’étaient presque toujours des êtres d’une insurmontable perversité.

Du Dépôt de la préfecture de police on les amène, par les méandres sans nombre d’un long couloir en planches, jusqu’à une petite geôle voisine du bureau où se tient le chef de service qui doit prononcer sur leur sort. Un à un, on les fait entrer ; un garde de Paris les accompagne et les surveille. Chaque dossier, préparé d’avance, a reçu toutes les pièces qui peuvent être utiles. D’un seul coup d’œil, on voit à qui l’on a affaire, et, quatre vingt-quinze fois sur cent, c’est à une vieille connaissance. Il y a des mendiants âgés de vingt-cinq ans qui, plus de quarante fois, se sont accoudés contre la petite