Page:Du Camp - Paris, tome 4.djvu/255

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

qu’il ait été question, au commencement du dix-huitième siècle, d’abandonner une maison si mal abreuvée. Germain Boffrand fut chargé de faire des sondages et de reconnaître s’il n’existait pas dans l’enceinte même de l’établissement une source ou une nappe d’eau qui pût désaltérer la population de Bicêtre. Il se mit à l’œuvre en 1733, et en 1735 il avait creusé ce fameux puits dont la célébrité est universelle. C’est un immense puisard d’un aspect vraiment imposant. Lorsqu’on se penche au-dessus de la margelle, qui n’a pas moins de cinq mètres de diamètre, on voit briller l’eau, qu’une profondeur de cinquante-huit mètres fait paraître toute noire. Selon la saison, la nappe exploitable est de trois à quatre mètres. Les huit derniers mètres de l’excavation ont été creusés dans le roc vif ; tout le reste est maçonné au ciment romain.

C’étaient les pensionnaires de Bicêtre qui jadis étaient condamnés à extraire l’eau nécessaire aux besoins de la maison. À cet effet, trois brigades, composées chacune de trente-deux hommes pris parmi les indigents, les aliénés et les épileptiques, étaient sur pied jour et nuit. À l’aide d’un cabestan à huit branches, à chacune desquelles quatre hommes étaient attelés, on manœuvrait deux seaux contenant 270 litres, qui, montant et descendant, se faisaient équilibre dans la longue gaine de pierre. On arrivait ainsi à verser dans le réservoir 156 600 litres d’eau en vingt-quatre heures ; mais c’était au prix de difficultés excessives, qu’augmentaient encore les attaques subites dont les épileptiques et les fous étaient souvent atteints.

Cette méthode primitive, à laquelle il était cruel d’astreindre des vieillards, et que nous avons blâmée au dépôt de Villers-Cotterets, où elle est encore employée, fut maintenue jusqu’en 1857. À cette époque, elle céda la place à un manège tourné par des chevaux, qui, ne