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voiture, à pied, dans une boutique, vous ne pouvez venir à bout de rien, grâce au nombre et à l’importunité des mendiants. »

Deux ans plus tard, ce n’est plus à la mendicité qu’on s’en prend, c’est à la charité ; une ordonnance de 1700 frappe d’une amende de 50 livres toute personne qui aura fait l’aumône à un mendiant[1]. Sous la régence, le grand magicien Law va tout arranger ; il lui suffit d’un coup de baguette pour moraliser Paris, lui enlever ses vagabonds et peupler, par la même occasion, « l’Ile du Mississipi, » comme dit Buvat. Le 12 mai 1719, la compagnie d’Occident est autorisée à prendre les jeunes gens des deux sexes qu’on élève à la Pitié, à Bicétre, à la Salpêtrière, aux Enfants trouvés, et à les transporter dans l’Amérique française ; en une seule fois, on en dirigea cinq cents sur la Rochelle, où ils furent embarqués ; les femmes avaient fait la route en chariot, les hommes à pied, sous l’escorte de trente-deux archers. Pas plus que « l’enfermement » à l’hôpital général, la transportation n’obtint un résultat satisfaisant, car le duc de Bourbon, en 1725, ordonne de saisir, de séquestrer et de marquer d’un fer rouge au bras tous les mendiants venus des campagnes à Paris ; les hospices devaient être trop étroits ; le contrôleur général Dodun n’est point arrêté par la difficulté ; dans ses instructions aux intendants, il écrit : « Devant être couchés sur la paille et nourris au pain et à l’eau, ils tiendront moins de place. »

Encore une fois, la mesure est inefficace : en octobre 1749, en mai 1750, on revient au procédé que Law avait mis en usage. D’Argenson, ministre de la guerre, qui,

  1. Une vieille loi anglaise punissait comme coupable d’entretenir, non seulement la paresse, mais le crime, celui qui faisait l’aumône à tout le monde indistinctement. Voy. la Revue britannique, livraison du 2 avril 1871 p. 435.