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établi des bureaux de secours, des ambulances que l’on reconnaissait facilement la nuit à une lanterne rouge, et où l’on était certain de rencontrer des médecins qui se relevaient de deux heures en deux heures, comme des soldats en faction.

Le service des hôpitaux, quintuplé, décuplé, pendant une longue période de cent quatre vingt-neuf jours, ne languit pas un seul instant ; les administrateurs, les religieuses, le corps médical tout entier, maîtres et élèves rivalisèrent de dévouement et d’abnégation. Les agents de surveillance et de comptabilité restaient imperturbables dans leur bureau à côté d’un foyer épidémique infecté au plus haut degré ; leurs registres, tenus avec une régularité parfaite, permettraient d’écrire une histoire du choléra jour par jour, heure par heure, hôpital par hôpital, lit par lit. Grâce à ces précieuses paperasses couvertes d’une écriture hâtive, il est facile de reconstruire le chemin suivi par la maladie dans Paris, de dire à quel corps de métier elle s’est adressée de préférence, sur quel âge elle a sévi, combien d’heures il lui a fallu pour mettre un homme au tombeau.

Ces chiffres, si tristement éloquents pour qui sait les lire, prouvent que les excès auxquels les ouvriers se livrent ordinairement le dimanche n’ont pas été sans influence sur l’épidémie, et qu’ils l’ont augmentée d’une façon presque régulière et normale pendant toute la durée du fléau. En effet, les hôpitaux civils ont reçu 13 777 malades ; si l’on divise ce total par cent quatre vingt-neuf, qui est le nombre des jours cholériques, on voit que la moyenne des entrées quotidiennes a été de 72,36 ; mais, en relevant le nombre des admissions pour chacun des jours de la semaine pris isolément, on reconnaît que le dimanche donne en moyenne 67,88 et le lundi 76,85 : notable différence, qui doit être portée au compte du cabaret. Deux fois encore, en 1849 et en