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quées, que bien des gens emploient pour attirer sur eux les largesses de l’Assistance publique. Une femme obtient du commissaire de police de son quartier un certificat en règle attestant qu’elle est mère de quatre enfants ; elle surcharge le 4 et en fait un 10. Du reste, lorsqu’ils se sont accoutumés à demander des secours, ils reconnaissent rapidement la façon d’agir de l’administration, ils savent que le nombre d’enfants est le motif le plus sérieux qu’on puisse invoquer près d’elle pour obtenir une allocation. Dès lors il n’est peut-être pas très-difficile de comprendre pourquoi la population indigente de Paris est si particulièrement féconde.

Parfois l’Assistance, au lieu de donner un secours insignifiant, s’est acharnée, pour ainsi dire, à sauver des malheureux de la misère. Comme ils sont logés en garni, ce qui est ruineux, elle leur a loué un appartement dont elle a payé les deux premiers termes d’avance ; ils n’ont pas de meubles, elle leur a donné un mobilier composé d’un lit de noyer poli, d’une couverture de laine, de deux oreillers ; on y ajoutait un lit en fer, une couchette en fer avec sommiers et matelas pour les enfants, six chaises, une table, une commode en noyer ; tous ces objets, revenant à plus de trois cents francs et livrés dans le courant du mois de juin 1866, étaient vendus au mois d’août suivant par le ménage nécessiteux moyennant cinquante francs, qui en un seul jour étaient dépensés au cabaret.

Quelques-uns déploient un véritable esprit d’invention dans la mise en scène de leur misère. Un ouvrier galochier obtint, vers 1866, un succès qui a fait bien des jaloux parmi ses semblables. Il était installé dans une cahute de bois, ouverte à tous les vents et dans l’intérieur de laquelle l’œil pouvait plonger. Là, sur une litière de paille, accompagné de deux ou trois enfants qui ne lui appartenaient pas, il geignait tout le jour, et,