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La maison est d’une propreté merveilleuse, c’est l’unique coquetterie de ces saintes filles d’avoir des cuivres éblouissants et des parquets périlleux à force d’être frottés. La lingerie, dont elles sont très-fières, lorsque les armoires en sont bien garnies, répand une odeur de lessive corrigée par le parfum de quelque chapelet de racines d’iris caché derrière des piles de serviettes. Elles sont obligées d’avoir toujours une grosse provision de linge, car elles prêtent des draps de lit, même des chemises, à ceux qui n’en ont pas, et ceux-là sont nombreux ; une fois par mois on change les draps, une fois par semaine les chemises ; il n’est pas toujours facile de les faire restituer et l’on en a souvent retrouvé dans les magasins du mont-de-piété. Elles ont aussi leur réserve de vêtements chauds, tricots et gilets de flanelle, de bas de laine, de chaussons, de camisoles doublées de finette. Dans une de ces maisons, j’ai vu de vieilles chaussures précieusement rangées sous une table ; brodequins d’hommes et bottines de femmes se trouvaient côte à côte. C’est parce qu’une des sœurs s’est imaginé d’aller quêter les vieux souliers à domicile ; elle trouve ainsi moyen, sans bourse délier, de chausser ses pauvres qui vont pieds nus.

La maison s’ouvre généralement par une salle garnie de bancs et chauffée à l’aide d’un poêle qu’une grille protège, car il faut éviter que les enfants puissent se brûler. C’est là que les malades prennent place deux ou trois fois par semaine, lorsque le médecin divisionnaire du bureau de bienfaisance vient faire la visite et donner ses consultations. Selon la pauvreté du quartier, la moyenne des consultants varie entre vingt-cinq et trente-cinq. Les médecins arrivent à l’heure indiquée ; ils se font généralement un point d’honneur de ne pas laisser attendre ces clients, qui bien souvent quittent leur ouvrage pour venir raconter le mal dont