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cice des mille droits vexatoires donnait une importance excessive ; de plus, il était combattu secrètement et paralysé par les fermiers généraux, qui faisaient une pêche d’autant plus fructueuse que l’eau était plus trouble. Les céréales, et par conséquent la vie matérielle de la France, appartenaient à une compagnie de maltôtiers qui, par leurs relations, par l’intérêt qu’ils donnaient de l’argent qu’on leur confiait, étaient une vraie puissance dans l’État, puissance plus redoutable que celle du roi, car elle déterminait à son gré l’abondance ou la disette

Dans le principe, sous le règne de Charles IX, le droit d’exportation était mis aux enchères ; sous Louis XIV, il résultait d’un brevet acheté à prix d’argent. Ce brevet dégénéra bientôt en bail réel, qui, rendu définitif, attribuait en quelque sorte à celui qui le possédait le privilège exorbitant du commerce exclusif des grains. Des baux de cette nature furent passés en 1729 et en 1740. Le dernier, celui que l’histoire a flétri du nom de Pacte de famine, fut signé à Paris le 12 juillet 1765 en faveur de Malisset, ancien boulanger convaincu de banqueroute, homme intelligent, hardi, peu scrupuleux et inventeur d’une prétendue mouture économique. Louis XV était intéressé à la spéculation pour une somme de dix millions, qu’il avait versée et qui rapportait d’énormes intérêts. Les malheureux, du reste, n’étaient point oubliés ; cet acte, d’où allait sortir une fortune scandaleuse pour Malisset et pour MM. de Chaumont, Rousseau et Perruchot, qui lui servaient de caution, contient à l’article 19 une clause dérisoire : « il sera délivré annuellement une somme de 1 200 livres aux pauvres, laquelle sera payée par quart à chaque intéressé, pour en faire la distribution ainsi qu’il jugera convenable. » Louis XV ne semble guère dissimuler sa participation à ce genre de spéculation, car l’Almanach de 1774 indique