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En ces lieux, où en tout temps.
On voit rire le printemps.
Là. de mille et mille esprits
Qui volent par le pourpris,
Le ciel qui sienne t’appelle,
Ne voit une ame plus belle :
Le ciel ne peut-il pas bien
Reprendre ce qui est sien ?
Le ciel t’a reprise donc,
Nous laissant d’un mesme tronc
C’est’ autre fleur ta compagne,
Et ta lîlle qui se baigne
En ce labeur glorieux.
Qui t’a mise au rang des Dieux.
Permette le ciel ami,
Qu’après un siècle et demi
La fleur ici florissante
A la fleur non périssante
Puisse voler d’un prinsaut,
Pour se rejoindre là-haut.
Cependant nous qui vivons,
Ces doux vers nous escrivons,
Ahn que de race en race
L’immortalité embrasse
La non mortelle valeur
De l’une et de l’autre fleur.


ELEGIE

Non que d’excuse, ou feinte véritable,
Me soit besoin en ma cause équitable :
Non que je soye en doute de la foy
Qui vous unit estroitement à moy :
Non que je pense un trait de jalousie
Estre fiché dans votre fantasic
Pour tout cela, ou pour tel autre poinct,
O le cœur mien je ne vous escri point :
Mais bien pourtant que la ferme pensée
Qui tient mon ame à la vostre enlacée,
Ne me permet un seul ennuy sentir,