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XII

La docte main dont Minen’e eust appris.
Main, dont l’yvoire en cinq perles s’allonge,
C’est, ô mon cœur, la lime qui te ronge,
Et le rabot, qui polit mes escrits.
Les chastes yeux, qui chastement m’ont pris,
Soit que je veille, ou bien soit que je songe,
Ardent la nuict de mon œil, qui se plonge
Au centre, où tend le rond de mes esprits.
L’esprit divin, et la divine grâce
De ce parler, qui du harpeur de Thrace
Eust les ennuis doucement enchantez.
Vous ont donné la voix inusitée,
Dont, ô mes vers, sainctemeut vous chantez
Le tout divin de vostre Pasithee.


XIII

Puisque la main de la sage nature
Bastit ce corps, des Grâces le séjour,
Pour embellir le beau de nostre jour
Du plus parfait de son architecture :
Puisque le ciel trassa la portraiture
De cet esprit, qui au ciel fait retour,
Abandonnant du monde le grand tour
Pour se rejoindre à sa vive peinture :
Puis que le Dieu de mes affections
Y engrava tant de perfections
Pour figurer en ceste carte peinte
Uastre bénin de ma fatalité,
l’apprend ce vœu à l’immortalité,
Devant les pieds des vostre image sainte.