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L’espoir des Princes nous abuse,
Mais nostre Dieu n’est point menteur.
Celuy (Seigneur) à qui ta voix
Vivement touche les aureilles,
Bien qull sommeille quelquefois,
Finallement tu le réveilles :
Lors en tes œuvres nompareilles
Fichant son esprit et ses yeux,
Il se rit des vaines merveilles
Du misérable ambitieux :
Qui esloigné du droct sentier
Suit la tortueuse carrière,
Ou celuy qui est plus entier,
Plus souvent demeure en arrière,
Humant la faveur journalière
Compagne des soucis cuisans,
Et la vanité familière
A la tourbe des courtisans.
Ma net, évitez ce danger
Et n’attendez pas que l’orage
Par force vous face ranger
Au port après vostre naufrage.
« L’homme rusé par long usage
» N’est folement avantureux :
» Mais qui par son péril est sage,
» Celuy est sage malheureux. »
Bien-heureux donques est celuy.
Qui a fondé son asseurance
Aux choses dont le ferme appuy
Ne desment point son asseurance.
C’est luy, que nulle violence
Peut esbranler taut seulement ;
Si bien il se contrebalance
En tous ses faicts également.
Celuy encor’ ne cerche pas
La gloire, que le temps consomme :
Sçachant que rien n’est ici bas
Immortel, que l’esprit de l’homme.
Et puis le Poète se nomme
Ores Cygne mélodieux,
Or, immortel et divin, comme