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Et la mort continuelle
Me talonnent pas à pas ?
Que me sert-il que je suive
Les princes, et que je vive
Aveugle, muet et sourd,
Si après tant de services
Je n’y gaignéque les vices
Et les bons jours de ta court ?
C’est une divine ruse
De bien forger une excuse,
Et en subtil artisan.
Soit qu’on parle, ou qu’on chemine,
Contrefaire bien la mine
D*un vieil singe courtisan.
C’est une louable envie
A ceux qui toute leur vie
Veulent demeurer oyseux
D’un nouveau ne faire conte,
Et pour garder qu’il ne monte,
Tirer l’eschelle après eux.
C’est belle chose, que d’estre
Des hommes appelle maistre.
Et du vulgaire eslongné.
Ne parlant qu’en voix d’oracle
Espouvanter d’un miracle
Et d’un sourcy renfrongné.
C’est chose fort singulière
Qu’une reigle irreguliere
Dessous un front de Caton :
Ou dire, qu’on est fragile,
AfFeublant de l’Evangile
La charité de Platon.
C’est une heureuse poursuite
Estre dix ans à la suite
D’un bénéfice empestré :
Et puis, pour toute ressourse,
Vuider et procez et bourse,
Par un arrest non chastré.
C’est une belle science.
Pour faire une expérience
Avant qu’estre vieil routier,