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LETTRES D’UN INNOCENT

joie que tu m’as donnée. Comme je t’aime, ma bonne chérie ! Enfin, espérons que tout cela aura une fin. Il faut que je conserve toute mon énergie.

Encore mille baisers, ma chérie,

Alfred.
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Jeudi, 11 heures du soir.
Ma chérie,

Les nuits sont longues ; c’est vers toi que je me retourne, c’est dans ton regard que je puise toutes mes forces, c’est dans ton amour profond que je trouve le courage de vivre. Non pas que la lutte me fasse peur, mais vraiment le sort m’est trop cruel. Peut-on imaginer une situation plus épouvantable, plus tragique pour un innocent ? Peut-on imaginer un martyre plus douloureux ?

Heureusement que j’ai l’affection profonde dont toutes nos familles m’entourent, que j’ai enfin ton amour qui me paie de toutes mes souffrances.

Pardonne-moi, si je gémis parfois ; ne crois point pour cela que mon âme soit moins vaillante, mais ces cris même me font du bien et à qui les ferais-je entendre si ce n’est à toi, ma chère femme ?

Mille bons baisers pour toi et les petits,

Alfred.
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Mercredi, 5 heures.
Ma chérie,

Je veux encore t’écrire ces quelques mots pour que tu les trouves demain matin à ton réveil.

Notre conversation, même à travers les barreaux