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LETTRES D’UN INNOCENT

Mais la vérité finit toujours par se faire jour, envers et malgré tous. Nous ne sommes plus dans un siècle où la lumière pouvait être étouffée. Il faudra qu’elle se fasse entière et absolue, il faudra que ma voix soit entendue par toute notre chère France, comme l’a été mon accusation. Ce n’est pas seulement mon honneur que j’ai à défendre, mais encore l’honneur de tout le corps d’officiers dont je fais partie et dont je suis digne.

J’ai reçu les vêtements que tu m’as envoyés. Si tu en as l’occasion, tu pourras m’envoyer ma pèlerine, la pelisse est inutile. Ma pèlerine est dans l’armoire de l’antichambre.

Embrasse bien nos chéris pour moi. J’ai pleuré sur cette bonne lettre de notre cher Pierrot ; il me tarde bien de pouvoir l’embrasser, ainsi que vous tous.

Mille baisers pour toi.

Ton dévoué
Alfred.
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Jeudi, 14 Décembre 1894
Ma chère Lucie,

J’ai reçu ta bonne lettre ainsi que de nouvelles lettres de la famille. Remercie-les bien tous de ma part ; tous ces témoignages d’affection et d’estime me touchent plus que je ne saurais dire.

Quant à moi, je suis toujours le même. Quand on a la conscience tranquille et pure, on peut tout supporter. Je suis convaincu que la lumière finira par se faire, que la certitude de mon innocence finira par entrer dans tous les cœurs.