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LETTRES D’UN INNOCENT

monde, notre honneur, celui de nos enfants, le nôtre à tous, et que je jette encore le cri d’appel vibrant de l’homme qui, depuis le premier jour de ce lugubre drame, ne demande que la vérité.

Il y a donc là une œuvre de justice qui plane au-dessus de toutes les passions, qui s’impose à tous, et elle doit s’accomplir. Je souhaite cependant, ma bonne chérie, pour nous deux, qu’elle s’accomplisse enfin, que notre effroyable et trop long supplice ait enfin un terme.

Je t’embrasse comme je t’aime, de toute la puissance de mon affection, ainsi que nos chers et adorés enfants.

Ton dévoué,

Alfred.

Mes meilleurs baisers à tes chers parents, à tous les nôtres.

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Le 25 décembre 1897.
Ma chère Lucie,

Plus que jamais, j’ai des minutes terribles où le cerveau s’affole ; c’est pourquoi je viens t’écrire, non pour te parler de moi, mais pour te donner toujours et encore les conseils que je crois te devoir.

Dans une situation aussi tragique que la nôtre, où il s’agit de l’honneur d’une famille, de la vie de nos enfants, il faut, ma bonne chérie, s’élever toujours et encore au-dessus de tout, écarter du débat toutes les questions de personnes, toutes les questions irritantes, pour appeler à toi tous les concours, toutes les bonnes volontés. Je sais mieux que