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LE CAPITAINE DREYFUS

à sa patrie que la découverte de la vérité, l’honneur de son nom, la vie de ses enfants.

C’est ce que je te dis dans toutes mes lettres, c’est ce que je t’ai répété hier soir, c’est ce que je viens te redire encore plus fortement que jamais : plus les forces décroissent, plus les énergies doivent grandir, les volontés devenir agissantes. Je ne puis, chère Lucie, que souhaiter pour toi comme pour moi, comme pour tous, que ce concours d’efforts aboutisse bientôt, te répéter toujours et encore courage et foi et t’embrasser de toute la puissance de mon affection, ainsi que nos chers et bons enfants.

Ton dévoué,

Alfred.
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Le 5 février 1897.
Chère et bonne Lucie,

C’est toujours avec la même émotion poignante, profonde, que je reçois tes chères lettres. Ton courrier de décembre vient en effet de m’être remis.

Te parler de mes souffrances, à quoi bon ? Tu dois bien penser ce qu’elles peuvent être, accumulées ainsi sans un moment de trêve ou de halte qui vienne retremper les forces, raffermir le cœur, le cerveau si ébranlés, si épuisés.

Je t’ai dit que ma confiance était égale aussi bien dans les efforts des uns que dans ceux des autres, que d’une part j’avais l’absolue conviction que l’appel que j’ai encore fait a été entendu, que je vous connais tous et que vous ne faillirez pas à votre devoir.

Ce que je veux ajouter encore, c’est qu’il ne faut