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LETTRES D’UN INNOCENT

branlable, énergique, ardent, qui t’est nécessaire dans la noble mission qui t’incombe, je suis venu parfois me lamenter, t’entretenir de petites souffrances, de petites tortures, que sais-je, augmenter ainsi ta poignante douleur. Tu pardonneras à ma faiblesse, faiblesse humaine trop naturelle, hélas !

Les mots, d’ailleurs, sont bien impuissants à traduire un martyre pareil au nôtre. Mais il ne peut y avoir qu’un terme : la découverte des coupables, la réhabilitation pleine et entière, tout l’honneur de notre nom, de nos chers enfants.

Je viens donc comme toujours ajouter à cette lettre, qui t’apportera l’écho de ma profonde affection, ce cri ardent de mon âme : Courage et courage, chère Lucie, pour marcher à ton but, avec une volonté farouche et ardente, jamais défaillante — et souhaiter pour tous deux, pour nos enfants, pour tous, qu’il soit bientôt atteint.

Tu embrasseras beaucoup les chers petits pour moi. Je ne vis d’ailleurs qu’en eux, qu’en toi, et j’y puise ma force. Embrasse bien tes chers parents, tous les nôtres pour moi, remercie-les de leurs bonnes et si affectueuses lettres.

Je termine à regret cette lettre en t’embrassant bien fort, si fort que je peux, comme dit notre cher petit Pierre.

Ton dévoué,

Alfred.

Soir. — Je viens de recevoir enfin tes envois et livres des mois de décembre, janvier et février, et je t’assure que j’en avais bien besoin. Encore de bons et ardents baisers pour toi, nos chers enfants, tes