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LE CAPITAINE DREYFUS

pensées profondément réfléchies dans le silence sépulcral au milieu duquel je vis.

J’ai trop souvent pensé à moi, pas assez à toi, aux enfants. Ton martyre, celui de nos familles sont aussi grands que le mien. Il faut donc que nos cœurs s’élèvent au-dessus de tout pour ne voir que le but à atteindre : notre honneur.

Je resterai debout tant que mes forces me le permettront pour te soutenir de toute mon ardeur, de toute la grandeur de mon affection.

Courage donc, chère Lucie, et persévérance ; nous avons nos petits à défendre.

Embrasse frères et sœurs pour moi, dis-leur que j’ai reçu les lettres encore adressées à l’Île-de-Ré et que je leur écrirai prochainement.

Pour toi, mes meilleurs baisers,

Alfred.

J’oubliais de te dire que j’ai reçu hier les deux revues du 15 mars, mais c’est tout.

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Cher petit Pierre,

Papa t’envoie de bons gros baisers ainsi qu’à petite Jeanne. Papa pense souvent à tous les deux. Tu montreras à petite Jeanne à faire de belles tours en bois, bien hautes, comme je t’en faisais et qui dégringolaient si bien.

Sois bien sage, fais de bonnes caresses à ta maman quand elle est triste. Sois bien gentil aussi avec grand’mère et grand-père, fais de bonnes niches à tes tantes. Quand papa reviendra de voyage, tu viendras le chercher à la gare avec petite Jeanne, avec maman, avec tout le monde.

Encore de bons gros baisers pour toi et pour Jeanne. Ton papa.

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