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elles virent, à leur inexprimable terreur, la porte s’ouvrir brusquement et un homme, à l’air féroce, tout hâve et déguenillé, se précipiter dans la chambre.

Sans un regard, sans un mot pour les femmes effondrées devant lui, il s’avança vers le corps blanc et immobile d’où venait de s’envoler l’âme si pure de Lucy Ferrier. Se penchant sur elle, il baisa avec respect son front glacé, puis saisissant sa main il en arracha l’anneau de mariage : « Du moins elle ne portera pas cela dans la tombe », cria-t-il d’un ton de défi. Et avant que l’alarme ait pu être donnée, il avait déjà dégringolé l’escalier et avait disparu. Tout cela s’était passé si vite, d’une façon si étrange que les témoins de cette scène auraient eu de la peine à croire eux-mêmes à sa réalité, s’ils n’en avaient eu une preuve indéniable : l’anneau de mariage de Lucy avait bien été enlevé de son doigt.

Pendant plusieurs mois, Jefferson Hope erra dans les montagnes, menant une véritable vie de sauvage et berçant dans son cœur le désir immodéré de vengeance qui le possédait tout entier. Bientôt des récits étranges commencèrent à circuler dans la ville ; on parlait d’une espèce de fantôme qu’on voyait, tantôt ramper près des faubourgs, tantôt errer comme une apparition dans les gorges solitaires et les ravins abrupts. Un jour Stangerson entendit siffler à ses oreilles une balle qui, traversant