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l’hiver lorsque la neige les recouvre de son linceul, toutes grises l’été, grâce à la poussière alcaline dont elles sont imprégnées. Mais partout, même aspect inhospitalier, même stérilité, partout même désolation. C’est la terre du désespoir ; on n’y voit pas d’habitants. Une bande de Pawnees, ou de Peaux-Rouges, à la recherche d’un nouveau terrain de chasse, la traverse peut-être de temps à autre, mais les plus braves d’entre les braves ne se sentent rassurés que lorsqu’ils quittent ces terribles plaines pour revenir à leurs prairies habituelles. Le coyote qui se cache dans les broussailles, le vautour qui plane dans les airs, l’ours grizzli qui déambule gauchement à travers les ravins et les rochers à la recherche de sa pâture, tels sont les seuls hôtes de ces parages.

Non, il n’y a pas au monde un paysage plus mélancolique que celui de la Sierra Blanca sur son versant méridional. À perte de vue, sans un accident de terrain, coupée seulement çà et là par quelques buissons de jujubiers, s’étend la plaine immense toute semée de plaques alcalines, tandis qu’à l’horizon se profile une longue chaîne de montagnes, dont les cimes décharnées dressent vers le ciel leurs sommets neigeux. Là, partout la vie semble suspendue ; jamais un oiseau ne raie de son vol l’azur sombre du ciel ; jamais une créature quelconque ne se meut sur cette terre grise, et l’impression qui