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Une expression de profond dégoût passa sur son visage, et éperonnant son cheval, il s’élança au galop à une telle allure que Catinat, après avoir vainement essayé de le suivre, fut obligé de lui crier de s’arrêter.

— Ce n’est pas l’habitude de ce pays de galoper d’un train pareil sur les routes, dit-il tout essoufflé.

— Singulier pays, dit l’étranger perplexe. Il me sera peut-être plus facile de me rappeler ce qui est permis que ce qui ne l’est pas. Pas plus tard que ce matin, j’ai pris mon fusil pour abattre un pigeon qui volait au-dessus des toits dans la rue, et le vieux Pierre m’a enlevé mon arme d’un air effrayé, comme si c’eût été un ministre que je visais. Et puis, il y a ce vieil homme, à qui ils ne veulent même pas laisser dire ses prières.

Catinat se mit à rire.

— Vous ne tarderez pas à connaître nos mœurs, dit-il. Ceci est un pays populeux, et si chacun galopait ou tirait des coups de fusil suivant sa fantaisie, il pourrait en résulter du mal. Mais holà ! Qu’est ceci ? Cela m’a l’air d’une des voitures de la cour.

Un nuage de poussière blanche qu’ils voyaient depuis un instant roulant vers eux, était maintenant si près qu’ils distinguèrent le scintillement des panneaux dorés et l’habit rouge du postillon. Les deux cavaliers se rangèrent pour laisser la route libre : le carrosse passa en roulant lourdement, traîné par deux magnifiques bêtes gris