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Deux servantes se tenaient chacune d’un côté du mur, hurlant de toute la force de leurs poumons et au milieu le vieux domestique. Pierre, un austère calviniste, dont la dignité n’avait jamais encore été mise à pareille épreuve, tournoyait en agitant les bras et poussant des hurlements que l’on aurait pu entendre du Louvre. Une petite boule de poils noirs, au milieu desquels on distinguait un petit œil rouge et deux fines dents blanches s’agrippait au bas de laine qui recouvrait son maigre mollet. Aux cris du domestique le jeune étranger qui était retourné à son cheval revint en courant, et arrachant l’animal il lui donna deux coups secs sur le museau et le fourra, la tête en avant, dans le sac d’où il s’était échappé.

— Ce n’est rien, dit-il en excellent français, c’est un jeune ours… C’est ma faute, j’aurais dû tenir le sac fermé. L’animal est né le jour où j’ai quitté New-York, il y aura six semaines mardi prochain. Est-ce à l’ami de mon père, monsieur Catinat, que j’ai l’honneur de parler ?

— Non, monsieur, dit le mousquetaire toujours dans l’escalier ; mon oncle est sorti, mais je suis le capitaine de Catinat, à votre service ; et voici mademoiselle Catinat, la fille de votre hôte.

L’étranger monta l’escalier et salua les deux jeunes gens avec un air assez timide, tandis qu’il offrait gracieusement à Mlle Catinat une magnifique fourrure qui pendait à son bras.

— L’ours est pour votre père, dit-il, et j’ai apporté