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naient avec des actes d’une férocité inouïe, et le capitaine qui avait le malheur de tomber entre leurs mains obtenait tantôt de pouvoir se sauver avec sa cargaison, après avoir été traité par eux comme un camarade de débauche, tantôt se voyait servir à table dans sa propre cabine, ses lèvres, son nez accommodés à la croque au sel. Il fallait être un rude marin pour oser, à cette époque, s’aventurer dans le golfe des Caraïbes.

C’était un de ces hommes bien trempés que le capitaine John Scanow du navire l’Étoile-du-Matin, et pourtant il poussa un soupir de soulagement quand il entendit le clapotis de son ancre qu’il venait de jeter à une centaine de yards de la citadelle de Basse-Terre. Sainte-Kitt’s était le dernier port où il devait relâcher, et, dès le lendemain matin, il allait faire voile vers les Îles Britanniques. Il en avait assez de ces mers hantées par les écumeurs ! Depuis qu’il avait quitté Maracaïbo, ses cales remplies de sucre et de poivre rouge, il n’avait pu s’empêcher de frémir à chaque voile qu’il avait aperçue se détachant à l’horizon violet des mers du tropique. Il avait longé les Îles sous le Vent, abordant çà et là, et partout il entendait raconter de nouveaux massacres, de nouvelles infamies.