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jambes se dressait raide au-dessus du bordage, le talon engagé dans le porte-avirons. Tel était l’étrange groupe ballotté sur les longues vagues vertes de l’Atlantique.

Le Golden Rod mit un canot à la mer, et les malheureux naufragés furent bientôt transportés sur le pont. On ne trouva pas la moindre trace de vivres, ni aucun autre objet que la rame et la bible ouverte sur laquelle s’écrasait le visage du petit homme en noir. L’homme, la femme et l’enfant étaient morts depuis un jour au moins. On dut les immerger avec les courtes prières usitées sur les mers. Il avait semblé d’abord que le petit homme à la bible fût mort, lui aussi, mais Amos perçut un faible battement du cœur, en même temps qu’une légère buée ternissait le verre présenté devant sa bouche. Ils l’enveloppèrent dans une couverture chaude et l’étendirent au pied du mât ; le second lui introduisit de force dans la gorge quelques gouttes de rhum et se mit à le frictionner vigoureusement, si bien que la faible étincelle de vie qui était encore en lui se ranima. Pendant ce temps, Éphraïm Savage avait fait monter sur le pont les deux prisonniers qu’il tenait dans sa cale. Ils avaient un air tout déconfit quand ils émergèrent du panneau, avec leurs yeux clignotant dans la lumière du jour dont ils avaient été privés si longtemps.

— Vous m’excuserez, capitaine, dit le marin ; mais, vous comprenez, il fallait vous emmener ou nous laisser emmener par vous. Or, on m’attend