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garni de tapisseries des Gobelins qui allaient se rattacher au traversin. Tout autour courait une balustrade en métal poli, laissant de chaque côté du lit un intervalle de cinq pieds environ. Dans cet espace, entre le lit et la balustrade, que l’on appelait la ruelle, était une petite table ronde, recouverte d’une serviette blanche ; sur cette table étaient posés un plateau et une coupe d’argent, l’un portant trois tranches de poulet, l’autre contenant un peu de vin de Frontignan, pour le cas où le roi aurait eu faim, pendant la nuit.

Bontemps allait et venait sans bruit dans la chambre, ses pieds enfonçant dans le tapis moelleux. Une odeur lourde planait et on pouvait entendre la respiration puissante et régulière du dormeur. Il passa dans l’espace enclos par la balustrade et, la montre à la main, il attendit le moment exact où la routine inflexible de la Cour demandait que le roi fût réveillé. Sous la courte-pointe verte de soie orientale, à demi ensevelie dans les flots de valenciennes de l’oreiller, émergeait une tête couverte de cheveux noirs drus et ras avec le profil d’un nez recourbé et d’une bouche bien dessinée qui ressortait sur le fond blanc. Le valet remit sa montre dans sa poche et se pencha sur le dormeur.

— J’ai l’honneur d’informer Votre Majesté qu’il est huit heures et demie, dit-il.

— Ah ! Le roi ouvrit lentement ses grands yeux d’un brun foncé, fit le signe de la croix et baisa une petite relique qu’il tira de sa chemise de nuit.