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aussi j’écrirais cela ! Pourquoi donc ne l’écrirais-je pas ? J’éprouve des sentiments pareils, tout pareils à ceux qui se trouvent dans le livre, et moi-même je me suis vu parfois dans des situations semblables, par exemple, à celle de ce pauvre Samson Vyrine. Et combien il y a parmi nous de Samson Vyrine, de cœurs brisés comme le sien ! Et comme tout est bien décrit ! J’ai été sur le point de pleurer, matotchka, en lisant qu’il s’est mis à boire, le pécheur : il est devenu ivrogne, la boisson lui a enlevé l’usage de ses sens, et il dort toute la journée sous une pelisse d’agneau ; pour s’étourdir il prend du punch, il se lamente douloureusement et essuie ses yeux trempés de larmes avec un pan de sa sale redingote, lorsqu’il parle de sa brebis égarée, de sa fille Douniachka ! Non, c’est naturel ! Lisez donc cela ; c’est naturel ! Cela vit ! Moi-même j’ai vu cela ; — tout cela vit autour de moi ; tenez, Thérèse, par exemple... Mais, sans chercher plus loin, notre pauvre employé est peut-être, lui aussi, un Samson Vyrine, à cela près qu’il s’appelle autrement, Gorchkoff. — C’est une chose commune, matotchka ; il peut nous en arriver autant à vous et à moi. Et pour le comte qui habite sur la perspective Nevsky ou