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misère chez eux ! Et quel désordre ! Mais ce n’est pas étonnant : toute la famille demeure dans la même chambre ; pour la décence, on a seulement fait une séparation avec des paravents. La bière est déjà chez eux, — une petite bière très-simple, mais assez jolie ; ils l’ont achetée toute faite, l’enfant avait neuf ans ; il donnait, dit-on, des espérances. Ils font peine à voir, Varinka ! La mère ne pleure pas, mais elle est si triste, la pauvre ! C’est peut-être un soulagement pour eux d’en avoir un de moins sur les bras, mais il leur en reste encore deux, un enfant à la mamelle et une petite fille qui a un peu plus de six ans. Au fait, quel agrément y a-t-il à voir souffrir un enfant, son enfant, sans pouvoir lui venir en aide ? Le père, vêtu d’un vieux frac crasseux, est assis sur une mauvaise chaise ; il pleure, mais est-ce de chagrin ? Il se peut que ses larmes coulent comme cela, par habitude. Il est si étrange ! Il rougit toujours quand on lui adresse la parole, il se trouble et ne sait que répondre. La petite fille se tient adossée au cercueil, et elle est si chagrine, si pensive, la pauvrette ! Je n’aime pas, moi, matotchka Varinka, qu’un enfant soit pensif ; c’est déplaisant à voir ! À côté d’elle est couchée sur le plancher