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a pas de sagesse. Je sais qu’il existe de pareilles familles, mais je ne parlais pas d’elles. Pour parler ainsi il faut que tu n’aies pas eu une bonne famille, Lisa. Tu as dû souffrir. Hum !… C’est le plus souvent par pauvreté que cela arrive.

― Est-ce donc mieux chez les bourgeois ? Il y a des gens pauvres qui vivent honnêtement.

― Hum !… oui, peut-être… Mais, Lisa, l’homme aime à ressasser ses malheurs, et pour ses bonheurs, il les oublie. S’il était juste, pourtant, il conviendrait qu’il y a des uns et des autres pour tout le monde. Que tout aille bien dans la famille, Dieu distribue à tous ses bénédictions. Le mari est un bon garçon, aimant, fidèle, et tout le monde est heureux autour de lui. Même dans le chagrin on est heureux. Et puis, où n’y a-t-il pas de chagrin ? Tu te marieras peut-être, tu le sauras toi-même. Par exemple, les premières semaines du mariage d’une jeune fille avec l’homme qu’elle aime, quel bonheur ! que de bonheurs ! Partout ! Toujours ! Même les disputes finissent bien durant ces semaines bénies. ― Il y a des femmes… plus elles aiment, plus elles querellent, parole ! J’en connaissais une de ce genre : « Je t’aime ! c’est par