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bougé un doigt. Mais, pendant que se dissipait le premier saisissement, que les assistants recouvraient peu à peu le don de la parole et commençaient à mettre sur pied leurs hypothèses, qu’Oustinia Féodorovna fouillait fébrilement sous l’oreiller, sous le matelas et jusque dans les bottes du défunt, et qu’on faisait subir un interrogatoire sommaire à Remniov et à Zimoveikine, le locataire Océanov, jusque-là le plus borné, le plus timide et le moins ardent, recouvrait soudain, avec toute sa présence d’esprit, l’universalité de ses talents et de ses dons naturels, saisissait son chapeau et s’esquivait. Et, au moment où les horreurs de l’anarchie atteignaient leur comble dans cet appartement jusqu’alors si paisible, la porte s’ouvrit et, plus impressionnant que la foudre, on vit apparaître un monsieur de noble allure, au visage sévère et mécontent, suivi de Yaroslav Ilitch et de son chapitre derrière lesquels se tenait, confus, M. Océanov lui-même. Le monsieur à l’air noble et sévère marcha droit au lit sur lequel reposait Sémione Ivanovitch, le tâta, fit une grimace, haussa les épaules et déclara que c’était couru, que l’homme était mort, en rappelant toutefois que le même accident était arrivé ces jours derniers à un monsieur des plus honorables et d’une haute taille, à qui il avait pris comme ça l’idée de trépasser. Alors, il s’éloigna du lit, dit qu’on l’avait dérangé pour rien et sortit.