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On souleva Sémione Ivanovitch et on le porta sur son lit. Quand en s’y étendant, il sentit la belle-sœur à ses côtés et le coffret sous ses pieds, il poussa un cri terrible, se mit presque à quatre pattes et, tout tremblant, s’efforça de couvrir de ses mains et de son corps la plus grande surface possible de sa couchette, tout en jetant sur les assistants des regards sauvages et effarés, comme s’il eut voulu dire qu’il préférait la mort à l’abandon. ne fût-ce que de la centième partie de son bien…

Il resta ainsi couché deux ou trois jours derrière son paravent, à l’écart du monde et de tous ses vains tracas. Dès le lendemain, personne ne pensait plus à lui. Le temps cependant suivait son cours et les heures succédaient aux heures, les jours aux jours. Une sorte de torpeur délirante avait envahi la tête brûlante et lourde du malade. Mais il ne bougeait pas, ne se plaignait pas. Au contraire, il gardait un silence farouche et s’écrasait contre son lit, tel un lièvre effrayé, qui se serre contre la terre à l’approche du chasseur. Par moments un silence morne et désespérant pesait sur la chambre, signe que tous les pensionnaires étaient partis chacun à ses occupations, et Sémione Ivanovitch pouvait tout à son aise distraire sa tristesse en écoutant les bruits proches de la cuisine où l’hôtesse vaquait à ses occupations, ou le frôlement courant dans toutes