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— Je comprends, je comprends toutes vos excellentes raisons, chère Elena Ivanovna, interrompis-je avec une ardeur bien naturelle chez un homme qui savait combattre pour la vérité, mais vous ne tenez pas compte d’une chose, c’est qu’il ne peut vivre sans vous, puisqu’il vous réclame. C’est la preuve de son amour, de son amour passionné et fidèle… Vous n’avez pas su apprécier la valeur de son amour, chère Elena Ivanovna !

— Je ne veux pas ! Je ne veux pas ! Je ne veux rien entendre ! criait-elle en gesticulant de sa petite main si jolie, aux ongles roses et brillants. Vous me ferez pleurer, vilain. Allez y vous-même, dans ce crocodile, si cela vous paraît si agréable. Vous êtes son ami. Eh bien, allez-vous coucher près de lui pour l’amour de l’amitié et y passez votre vie à discuter sur des sujets fastidieux…

— Vous avez grand tort de traiter cette éventualité sur un ton de raillerie, fis-je, interrompant avec gravité cette femme par trop légère, Ivan Matveïtch m’a déjà invité à venir le rejoindre. Il n’est pas douteux que votre devoir vous y convie, tandis que je ne m’y rendrais que par générosité. Hier, comme il m’expliquait l’extraordinaire élasticité des parois de ce crocodile. Ivan Matveïtch insinua très clairement qu’il y aurait là place, non seulement pour vous deux, mais encore pour moi, en ma qualité d’ami de la maison et que nous arriverions fort bien à nous y installer tous les