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parce qu’il est impertinent ; que s’il le demandait respectueusement, je m’adoucirais peut-être et les lui donnerais, mais qu’autrement, il attendrait encore deux ou trois semaines ou tout un mois.

J’avais beau rager, ce fut lui le vainqueur. Je ne pus tenir quatre jours. Il commença à faire comme d’habitude dans les cas pareils, car les cas pareils s’étaient déjà présentés, avaient déjà été essayés (et, je le remarque en passant, je savais tout cela d’avance, je connaissais sa vile tactique). Il commençait par fixer sur moi un regard excessivement sévère, sans le détourner pendant quelques minutes, surtout en m’accueillant ou en me voyant partir. Si, par exemple, je tenais bon et faisais semblant de ne pas remarquer ces regards, lui, se taisant comme avant, procédait à de nouvelles tortures. Soudain, il lui arrivait, sans aucune nécessité, d’entrer doucement et avec calme dans ma chambre, quand je marchais ou lisais, de mettre une main derrière le dos, d’avancer la jambe et de fixer sur moi un regard sinon sévère, du moins tout à fait méprisant. Si je lui demandais ce qu’il voulait ? il ne répondait rien, continuait à me fixer pendant quelques secondes, ensuite, les lèvres serrées d’une façon particulière, d’un air très significatif, il pivotait lentement sur lui-même, et retournait lentement dans sa chambre. Au bout de deux heures, il ressortait et reparaissait