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long bâtiment en bois où, malgré l’heure avancée, on voyait, encore briller de la lumière. Il entra et demanda une chambre à un domestique en haillons qu’il rencontra dans le corridor. Après un coup d’œil jeté sur Svidrigaïloff, le domestique le conduisit à une petite chambre située tout au bout du corridor, sous l’escalier. C’était la seule qui fut disponible.

— Avez-vous du thé ? demanda Svidrigaïloff.

— On peut vous en faire.

— Qu’est-ce qu’il y a encore ?

— Du veau, de l’eau-de-vie, des hors-d’œuvre.

— Apporte-moi du veau et du thé.

— Vous ne voulez pas autre chose ? demanda avec une sorte d’hésitation le laquais.

— Non.

L’homme en haillons s’éloigna fort désappointé.

« Ce doit être quelque chose de propre que cette maison, pensa Svidrigaïloff ; — du reste, moi-même j’ai sans doute l’air d’un homme qui revient d’un café chantant et qui a eu une aventure en chemin. Je serais pourtant curieux de savoir quelle espèce de gens loge ici. »

Il alluma la bougie et se livra à un examen plus détaillé de la chambre. Elle était fort étroite et si basse qu’un homme de la taille de Svidrigaïloff pouvait à peine s’y tenir debout. Le mobilier se composait d’un lit très-sale, d’une table en bois verni et d’une chaise. La tapisserie délabrée était si poudreuse qu’on en distinguait difficilement la couleur primitive. L’escalier coupait en biais le plafond, ce qui donnait à cette pièce l’apparence d’une mansarde. Svidrigaïloff déposa la bougie sur la table, s’assit sur le lit et devint pensif. Mais un incessant bruit de voix qui se faisait entendre dans la pièce voisine finit par attirer son attention. Il se leva, prit sa bougie et alla regarder par une fente du mur.